La légende des sœurs Trung est connue au Vietnam comme une épopée légendaire, 1ere insurrection contre la domination Chinoise, à l’époque où le Vietnam était devenu un protectorat chinois sous le nom de Giao Chi.
Les origines de la première période de domination chinoise
Durant son histoire, le Vietnam a changé de nombreuses fois de nom, mais a aussi dû d’innombrables fois se battre pour son indépendance et la protection de son identité nationale.
Du Royaume de Van Lang au Royaume d’Au Lac
Les origines du Vietnam sont parsemées de légendes et restent encore incertaines.
Le premier royaume du Vietnam, appelé Van Lang, connut le règne de la légendaire dynastie des 18 rois Hung, qui prospéra pendant environ un millénaire. En 258 av JC cependant, le roi Thuc Phan du royaume d’Au Viet, au nord de Van Lang, lança une invasion qui aboutit à la destruction de Van Lang et à la fondation du Royaume d’Au Lac.
Ce n’est qu’à partir de cette date que l’on peut affirmer avec une presque certitude historique, la chronologie de ce qui deviendra, bien des années plus tard, le Vietnam d’aujourd’hui.
Du Royaume de Nam Viet au protectorat chinois
Quelques années plus tard, le premier empereur de la dynastie chinoise Qin, Qin Shi Huang, entreprit de conquérir le Royaume d’Au Lac, pour continuer l’expansion et l’unification de son territoire.
La dynastie Qin, très importante dans l’histoire de la Chine, mais relativement éphémère (de 221 av JC a 206 av JC), tombe avec la mort de l’empereur Qin Er Shi (fils de Qin Shi Huang) en 206 av JC.
A la mort de son empereur, le général Chinois Zha Tuo (appelé Triệu Đà par les Vietnamiens), qui était de base envoyé par la Chine pour mater la résistance vietnamienne, profita des troubles politiques dans son pays d’origine, pour s’emparer du Royaume d’Au Lac.
Il fonda ensuite la dynastie Triệu et nomma son nouveau royaume Nam Viet.
Bien que Triệu Đà ait adopté les coutumes de son nouveau peuple et organisé l’administration de son royaume de manière efficace, l’influence chinoise était indéniable.
Devant payer des tributs à la cour Han en échange d’une protection contre les invasions étrangères, le Nam Viet connut d’innombrables intrigues pour tenter de garder son indépendance.
Bien sûr, ce royaume qui occupait une bonne partie de la Chine méridionale actuelle, était une cible pour la dynastie Han qui avait succédé à la dynastie Qin.
En 111 av JC, le Nam Viet fut en effet envahi par son voisin Chinois, qui profita des troubles entre les héritiers de Triệu Đà.
Prenant comme prétexte que des membres de la communauté chinoise au Nam Viet ont été tués durant ces troubles, l’empereur Wudi de la dynastie Han, décida d’asseoir définitivement son pouvoir pour faire du Nam Viet un protectorat chinois sous le nom de Giao Chi.
Les Sœurs Trung
Durant cette période de protectorat chinois, on peut déjà noter la fierté et le courage propres au peuple vietnamien, qui était pourtant aux prémices de son histoire.
En effet, malgré les nombreux intellectuels et gouverneurs chinois envoyés, le peuple vietnamien résista farouchement à l’introduction de la littérature, des arts ou encore des techniques agricoles chinoises.
L’histoire des Sœurs Trung commence d’ailleurs sous la gouvernance de To Dinh, envoyé par la Chine pour gouverner Giao Chi. Celui-ci, réputé comme cruel et sans merci, maltraitait le peuple et tentait d’écraser sa culture.
Au Sud, dans le district de Vo Giang, naquit Thi Sach, futur mari de Trung Trac, l’une des Sœurs Trung. Il est décrit comme :
Descendant des rois Hùng et plein de talents.
Voyant sa vie exemplaire de droiture et de vertu, le peuple le voulut comme chef afin d’améliorer la destinée du pays.
Mais ayant peur de Tô Dinh rusé et cruel,
Thi Sach attendit l’occasion favorable et cacha ses intentions
Au Nord, dans le district de Me Linh, naquirent les Soeurs Trung, Trung Trac et Trung Nhi. Elles étaient les filles du prefet du même district, qui leur enseigna les arts martiaux et l’art de la guerre :
Belles fleurs que papillons et abeilles n’osaient offenser.
L’aînée se nommait Trac, la cadette Nhi
Elles étaient aussi douées en lettres qu’en art militaire ;
Ayant le génie stratégique, elles s’exerçaient encore aux combats armés,
Leur entraînement dépassait de loin toute commune mesure
Elles excellaient à manier toutes les armes sans exception
Thi Sach épousa l’ainée, Trung Trac, mais fut assassiné en 39 av JC, par le gouverneur Chinois To Dinh, qui avait découvert ses projets de révolte contre la domination chinoise.
L’assassinat de Thi Sach fut l’élément déclencheur de la révolte des Sœurs Trung. Pour se venger, elles réunirent une véritable armée et remportèrent assez de victoires pour se proclamer reines des 40 av JC.
La victoire des Soeurs Trung marque la fin de la première période de domination chinoise.
Malheureusement, 3 ans plus tard, les Sœurs Trung durent faire face au général Chinois Ma Yuan, surnommé « le dompteur des flots », venu mater la rébellion.
Leur armée, composée principalement de femmes, a, selon la légende, été déroutée par les soldats Chinois qui combattaient en exposant leurs parties intimes pour semer la confusion chez leurs adversaires.
Autre légende encensant la force de l’armée des Sœurs Trung, Phung Thi Chinh, noble Vietnamienne et capitaine dans l’armée Trung, accoucha sur le champ de bataille mais continua de se battre avec le bébé dans les bras.
Cependant, face à la défaite imminente, les Sœurs Trung se donnèrent la mort en 43 av JC en se jetant dans la rivière Hat.
Leur défaite marqua le début de la deuxième période de domination chinoise (qui, toutes périodes réunies, aura duré plus de 1000 ans).
Celle-ci sera d’ailleurs encore plus dure que la première, puisque le General Ma Yuan resta aux commandes et imposa une sinisation du territoire, sans résistance possible.
Les Sœurs Trung dans la culture vietnamienne
Les Sœurs Trung sont nationalement considérées comme des héroïnes ayant troqué leurs vies de nobles pour devenir les instigatrices de la 1ere insurrection contre la domination chinoise.
Il existe des centaines temples en leur honneur et en l’honneur de leurs générales, qui sont aussi entrées dans la légende, dont le premier qui a été transféré en 1819 à Hanoi, rue Dong Nhan.
Fête des Sœurs Trung à Hue en 1952
Chaque année, la fête des Sœurs Trung est un évènement national important, célébré entre le 3eme et 5eme jour du 1er mois lunaire.
Un district à Hanoi porte leur nom, et on ne compte les rues et les écoles dans tout le pays portant le nom des Sœurs Trung.
Enfin, l’histoire et la force guerrière des Sœurs Trung est telle que certains historiens considèrent l’existence d’une société vietnamienne fondée sur un pouvoir matriarcal.
D’ailleurs, dans l’extrait de texte cité plus tôt dans l’article, il est dit :
Mais sans support, comme un tigre sorti de la forêt, elles étaient sans force,
Elles s’affligeaient d’être nées dans le sexe faible et de ne pouvoir facilement mobiliser les autres
Bref, l’histoire a vite contredit cette partie du texte (qui décrivait le début de leurs vies), car les Sœurs Trung se sont transformées en légendaires reines guerrières vengeresses qui ont façonné l’histoire de ce peuple Vietnamien fier et indépendant.
A bientot avec Mandarin Road Voyages !